Table Rouge : Le flux libre instinctif

Le flux libre instinctif : c’est quoi et comment le pratiquer?

 Tiens-toi bien pour la nouvelle que je suis sur le point de t’annoncer. Le genre de nouvelle qui va probablement révolutionner ta vie (au moins une fois par mois).  

On est toutes capables de gérer notre flux menstruel pour l’évacuer aux toilettes. Oui, oui, tu as bien lu! Se passer de protections menstruelles (ou du moins en partie), c’est possible! Il suffit d’apprendre à connaître nos corps et nos cycles. 

Quand j’ai appris cette information, je me suis dit « okay mais pourquoi personne ne nous a jamais dit ça avant?!? ». Patriarcat, tabous menstruels, etc… On connaît l’histoire. Ce qu’on ne connaît pas, par contre, c’est cette méthode qui se nomme le flux libre instinctif. 

Mélissa Carlier, véritable pionnière dans la recherche sur le flux libre instinctif,  nous a transmis son savoir sur cette capacité que l’on porte toutes à l’intérieur de nous. Voici les secrets – ma foi bien gardés –  pour accéder à ce potentiel qui peut paraître relever de la magie, mais qui est en fait purement physiologique. 

C’est quoi, le flux libre instinctif?

Le flux libre instinctif (FLI), c’est un moyen de gérer ses menstruations de manière consciente et volontaire en libérant le sang aux toilettes. 

Tout comme on est capables de savoir quand notre vessie est remplie et à quel moment aller uriner, on a aussi cette capacité d’acquérir la continence menstruelle. Il s’agit simplement de se reconnecter avec les sensations de notre corps (écoulement du sang, contractions de l’utérus, etc.) pour déterminer à quel moment on doit se rendre aux toilettes pour libérer le sang. 

« C’est marrant dans le corps, tout est bien foutu, sauf les menstruations! C’est bizarre quand même! Ce n’est pas possible que tout soit autonome, sauf les menstruations, sachant qu’elles sont le fruit d’une machinerie extrêmement complexe qui est l’aboutissement de notre capacité de reproduction. » - Mélissa Carlier 

Le FLI, c’est une rééducation. C’est une manière de reprendre de l’autonomie sur nos corps. 

Ce que le flux libre instinctif n’est PAS 

Plusieurs fausses croyances entourent le FLI. C’est normal, on en parle si peu! 

C’est important de savoir que le FLI, ce n’est PAS une manière de contrôler le sang en retenant le flux par la force du périnée. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, les femmes qui maîtrisent leur sang ne passent pas leur journée le périnée serrée. De toutes manières, se serrer le périnée est inutile et physiquement impossible.  

On ne retient pas le sang à l’intérieur de nous, on l’élimine au bon moment. 

Le FLI repose plutôt sur un apprentissage sensoriel, psychomoteur et intuitif. ✨

Un pouvoir inné dont on ne parle pas  

C’est à se demander ; pourquoi on nous a coupées d’un truc hyper simple qui nous permet un plus grand confort menstruel? 

Le patriarcat, bien évidemment

C’est pas que notre corps est dysfonctionnel, c’est qu’on nous a fait croire qu’il l’était. On (à lire ici : toutes personnes nées avec un utérus) est conditionnées à se croire insuffisantes, à être surmédicalisées, à devoir dépendre de l’extérieur. 

Dans nos sociétés occidentales bien patriarcalisées, on nous apprend qu’être une femme est davantage un handicap qu’un super-pouvoir. On en vient rapidement à subir nos cycles plutôt qu’à les honorer. Dès la ménarche, on est mises sur la pilule contraceptive sans trop se poser de questions et hop! On ne comprend pas vraiment comment nos corps fonctionnent. Sans parler de toute la honte et les tabous qui entourent les menstruations, qui nous poussent à les invisibiliser. 

C’est impossible d’apprendre à se connaître sans oser explorer, sans être curieuses, sans aimer. Bonne nouvelle : si tu lies cet article, tu fais probablement partie du nouveau paradigme! On est en train de se réapproprier nos cycles. De comprendre le bug du système. De s’unir pour mieux rayonner dans toute notre entièreté. Yay!

Un schéma menstruel intériorisé

Imaginez une société où Pampers a le monopole depuis très longtemps. Et ainsi, on n’apprend plus aux enfants à aller aux toilettes! C’est ce qui s’est passé avec les menstruations. Je m’explique.  

Dans les sociétés où il n’y a pas de couches ou qu’elles sont très dispendieuses, les enfants apprennent à être continents très jeunes. En Occident, c’est de plus en plus tardivement. On a décalé l’âge de la continence parce qu’on a démocratisé le port des couches. 

Chez les personnes menstruées, on a démocratisé le port de protections menstruelles de la ménarche à la ménopause.  Il n’y a pas d’éducation menstruelle. On ne t’explique pas la physiologie de tes menstruations (anyways, on ne sait pas comment ça marche!). Dès nos premières lunes, on intériorise qu’avoir nos menstruations, c’est changer de serviettes toutes les 3h. Voilà, c’est tout! 

C’est un schéma très dur à déconstruire, parce qu’on ne le voit même pas! Comment faire pour sortir de cette vision, si on ne sait pas qu’il y a autre chose? C’est pour ça que je vous le dis haut et fort : IL Y A AUTRE CHOSE. 

« Quand j’ai découvert le FLI, je me suis rendu compte que la Terre était ronde! C’est comme si j’avais passé des années à croire qu’elle était plate! » - Mélissa Carlier 

First things first : comment fonctionnent nos menstruations?   

Okay, petit cours de menstruations 101. Parce qu’on ne peut pas comprendre la méthode du FLI sans revenir aux bases. 

Bref rappel : la couche intérieure de notre utérus (endomètre) s’épaissit à chaque cycle dans l’éventualité d’accueillir un embryon.  En l’absence de fécondation, l’endomètre s’évacue : ce sont les menstruations. 

Cet endomètre ne se libère pas d’un coup, il se détache en 3 à 7 jours. Il va se libérer grâce aux contractions de l’utérus. Entre chaque contraction, il y a une phase de repos (heureusement!). 

Là, je vous entends déjà dire : « Ha mais si j’ai une contraction, je dois courir aux toilettes pour fluer! ». Et non! Entre le moment où il y a une contraction et le moment où le sang est extériorisé, il peut s’écouler entre 30 minutes et une heure. Il n’y a pas d’urgence. 

Pourquoi le sang prend du temps à descendre de l’utérus à la vulve? 

  • Le sang coule par phases : surprise surprise, le sang ne coule pas en continu comme un robinet ouvert (en portant une culotte menstruelle, on s’en rend compte!). 
  • Le sang chill à l’entrée du col : dans un premier temps, le sang est logé dans des petites poches à l’entrée du col de l’utérus qui s’appellent les « fornix vaginaux ». Il ne descend donc pas directement au vagin.  
  • Le sang est retenu naturellement par la forme du vagin : on a l’habitude d’imaginer le vagin comme un toboggan vide et lisse. Le vagin est plutôt constitué de deux parois souples, collées l’une contre l’autre, entre lesquelles le sang doit se frayer un chemin. 
  • Le sang est aussi ralenti par les replis vaginaux : ce sont comme les dos d’âne de notre vagin qui empêchent le sang de couler à toute vitesse (eh oh, il y a des limites de vitesse ici!). 
  • L’inclinaison de notre utérus ralentit la descente du sang.  
  • La texture du sang n’est pas liquide : contrairement à l’urine qui coule comme de l’eau, le sang menstruel est épais et visqueux et coule donc plus lentement.  

Tous ces éléments physiologiques nous indiquent qu’on est créées de sorte à maîtriser notre flux (un moment de silence pour la nature qui est bien faite en mosus!). 

Le flux libre instinctif est accessible à toutes les femmes

Comment pratiquer le flux libre instinctif? 

Étape 1 : Déconstruire les croyances erronées  

Comment est-ce qu’on peut accéder à cette capacité intrinsèque, si déjà on refuse de porter en nous ce phénomène physiologique que l’on vit tous les mois? 

Pour se lancer dans la pratique, il est essentiel de (ré)apprendre à accueillir nos menstruations avec plus de douceur. Si tu as une vision de ton sang qui est sale et impur, tu peux essayer d’intégrer ces idées positives : 

  • Mon sang menstruel est un liquide riche et précieux 
  • Mes menstruations créent la vie 
  • Je peux me connecter à mon cycle menstruel au lieu de le subir.  

Dans la même lancée, si tu entretiens des préjugés face au FLI, c’est aussi le moment de les déconstruire.   Visite ce qui se passe à l’intérieur de toi : quelle est la première réaction que tu as eue quand tu as entendu parler de ces femmes mystiques qui libéraient leur sang dans la nature ?  (by the way, le FLI est pour toutes les personnes menstruées, il n’est pas réservé à une élite de femmes ultra spirituelles qui marchent pieds nus dans la forêt  😉).  

Prends ces croyances une à une, accueille-les et comprends que ce ne sont pas des vérités. Une croyance est forte quand on ne la voit pas. C’est là que l’éducation menstruelle est de mise, puisque pour désamorcer une croyance, il faut avoir accès à la contre-croyance. À cet égard, on ne peut que vous conseiller Le guide du flux libre instinctif de Mélissa Carlier. La lecture de cette Bible du FLI va vous faire changer complètement de discours, passant de « mon corps n’est pas capable » à « mon corps porte en lui tout ce qu’il lui faut pour y arriver, j’ai le savoir qui le prouve. » 

Étape 2 : Apprendre à reconnaître ses sensations 

Qu’est-ce que tu sens quand ton utérus se contracte? Ces indices peuvent être : 

  • Une crampe
  • Une lourdeur dans le bas du dos 
  • Une tension dans le bas du ventre 
  • Une sensation d’inconfort

Quand on ressent ces symptômes (ils peuvent varier pour chaque personne), on sait qu’une partie de notre endomètre commence sa descente, et on a plus ou moins 30 minutes pour aller aux toilettes. Quand même simple, non? 

Étape 3 : Repérer le bon moment pour aller fluer 

Ce moment peut soit être : 

  • Suite à une contraction; 
  • Intuitivement, tout simplement;  
  • Par automatisme à des moments clés. Par exemple, après une position prolongée ; si ça fait 2h que tu es assis·e devant ton ordinateur, tu as fort probablement du sang accumulé à l’intérieur, il suffit de te lever pour aller aux toilettes et libérer le fruit de ton utérus. 

Étape 4 : Savoir évacuer le sang 

  • La position favorable : mets tes pieds un peu en hauteur (par exemple sur un petit tabouret) de sorte à ce que tes genoux soient au-dessus de ton bassin. Cette position facilite l’écoulement du sang et la détente du périnée. 
  • La respiration : on ne pousse pas, on expire. L’expiration fait remonter le périnée et permet au sang de s'écouler plus facilement. 
  • Le temps : laisser 10-15 secondes de plus au sang qu’à l'urine pour descendre. 

Quelques clés pour cheminer dans ton apprentissage

  • Choisis ta protection menstruelle avec conscience : les coupes et les tampons bloquent certaines informations. Ces corps étrangers empêchent de ressentir la descente du sang, puisqu’ils font une pression en permanence sur le vagin. Pssst! On n’est pas contre les tampons ou les coupes. On est pour avoir le choix, et avoir conscience de notre capacité. 
  • Commence avec des culottes menstruelles pour être zen : si tu es stressé·e de tacher tes vêtements, tu vas te crisper et l’effet sera  inverse!
  • Accepte la phase d’apprentissage : tout comme un enfant n’apprend pas à être continent en deux jours, il te faudra sûrement plusieurs cycles être continente menstruelle. En général, au bout de 6 cycles, on arrive à libérer 80% de notre flux aux toilettes. 
  • Ne te mets pas de pression : offre-toi de la bienveillance. On ne peut pas tirer sur la plante pour qu’elle pousse! Tes perceptions vont s’affiner avec le temps, et souviens-toi que le but n’est pas nécessairement d’évacuer 100% de ton sang aux toilettes.  
  • Note ce que tu vis et ressens durant tes menstruations : pour apprendre à te connaître, le Journal intime menstruel est ton meilleur ami. 
  • Vas-y à ton rythme : si à la lecture de cet article, tu sens l’appel tout de suite, you go girl /beautiful human! Si tu ne te sens pas encore prête, tu peux attendre le prochain cycle. T’es pas moins féministe ou zéro déchet si tu ne maîtrises pas le FLI demain matin! On a déjà beaucoup de choses à gérer dans la vie. L’appel va venir de lui-même.  
  • Accueille tes peurs et souviens-toi qu’elles ne te définissent pas : quelle est cette peur que tu ressens à l’idée de commencer à expérimenter? Est-ce que tu as peur de l’échec, de tacher tes vêtements, etc.? 
  • Fais-toi confiance : ton corps est intelligent, ose incarner ce pouvoir intérieur.  

Le FLI n’est pas une technique unique, c’est un ensemble d’informations qu’on apprend à recevoir qui font qu’au bout d’un moment, on se connaît mieux. Plus on est nombreuses à le pratiquer, plus c’est facile d’y accéder. En te lançant dans l’aventure du FLI, tu vas peut-être permettre, sans le savoir, à pleins d’autres femmes de le faire. 

Nous sommes une. 

Mélissa Carlier

Mélissa Carlier

Mélissa Carlier est kinésithérapeute spécialisée en rééducation du périnée, formatrice et conférencière en flux libre instinctif et symptothermie moderne. Elle a fait du flux libre instinctif le cœur de ses recherches et démocratise le terme de « continence menstruelle », portée par la conviction qu’il s’agit là d’une révolution importante dans l’intimité des personnes avec utérus. 

Quelques ressources 


Doux apprentissage! ♡